Mirette avait repris ses balades au sein d’Artep avec l’un ou l’autre des deux frères. Elle connaissait à présent les ruelles, les escaliers et les moindres endroits où l’eau fraiche coulait. C’est pourquoi il ne lui fut pas difficile de sortir cette nuit-là. Habillée de sombre, elle descendit à pas de velours l’escalier, traversa sans se faire voir la grande cour du bas, et sortit sur la grande place à l’abri des regards indiscrets grâce à la lune qui ne montrait qu’un fin croissant. Elle remonta le filet d’eau, sachant que personne ne pourrait retrouver sa trace ainsi. Quand elle fut en vue de l’entrée de la ville, elle sortit du chemin. Elle ne voulait pas risquer d’être vue, et ni le porche ni la falaise n’empêchaient un félin de passer. Une fois loin elle jeta un œil en arrière et reprit sa course vers le désert. Aucun labyrinthe ne pouvait résister à son odorat, elle sentait le désert à pleines narines. L’aube se levait quand elle arriva à l’entrée, et s’engagea sur le chemin qu’elle avait parcouru plusieurs mois avant. Cette fois elle ne se retourna pas et ne ralentit non plus.
Flibuste marchait à grandes enjambées. Il retournait vers les appartements du roi, les informations que Chacha lui avait données ne lui plairaient pas.
— Mirette est partie cette nuit, bien avant l’aube.
— Partie ? De son plein gré ?
— Nous savons qu’elle a reçu une lettre la veille, une lettre qui l’a mise dans tous ses états, a dit Chacha. Avant que tu ne demandes, nous n’avons pas retrouvé cette lettre, elle l’a sans doute prise avec elle. Elle n’a rien pris d’autre. Il est possible qu’elle revienne toute seule dans quelques heures, ou quelques jours, ou bien… qu’elle ne revienne pas.
— Mais elle a pu y être contrainte n’est-ce pas ? Rien ne prouve le contraire ?
— Je suppose que c’est possible…
— Nous allons partir du principe qu’elle n’a pas voulu s’en aller d’Artep, qu’elle a été enlevée.
— Il n’y a aucune raison de faire cette hypothèse.
Flibuste avait dit sa dernière phrase avec toute la douceur dont il était capable. Il savait que les deux époux s’étaient fortement rapprochés lors des dernières semaines où Mirette avait été souffrante. Il imaginait la difficulté que devait éprouver Fleck à seulement émettre l’hypothèse qu’elle ait pu partir volontairement. Il était bien plus facile de supposer le contraire.
— Je suis ton roi, Flibuste. Je fais, moi, l’hypothèse qu’elle a été enlevée. Vas-tu t’opposer à moi ou bien m’aider à la retrouver ?
Le ton du fennec s’était durci. Les oreilles en arrière, le museau tendu, les babines frémissantes, il n’attendait qu’un mot pour déverser sa colère.
— Bien sûr que je vais t’aider. Je suis à tes côtés, comme toujours.
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